Mieux comprendre c’est mieux choisir…
ARTICLE 5
Au cours des articles précédents nous avons vu qu’obtenir suffisamment de protéine via son alimentation est faisable, quel que soit son régime. En revanche, nous avons aussi vu qu’une difficulté peut exister si l’on pratique un sport. A ce titre, même si les protéines animales semblent avoir l’avantage du point de vue “théorique”, mais en pratique, comment cela se traduit-il, au quotidien?
Dans ce 5éme épisode de la saga des protéines…
Je vous propose de tenter de comprendre comment cerner nos réels besoins en protéines en fonction de notre choix de régime alimentaire et de notre activité physique. En prenant en compte les risques potentiels liés à la carence ou l’excès de protéines.
Dans cette article, le rouge est utilisé pour :
• Mettre en évidence les idées importantes
ou
• Pour signaler des liens vers des articles expliquant les notions abordées dans la phrase. (Dans ce cas : il vous suffit de cliquer sur les mots en rouge pour rejoindre cet article)
Manger peu de viande ou être végétarien, est-ce vraiment compliqué?
Afin de nous aider à nous forger une opinion…
En continuant de m’appuyer sur la littérature scientifique et le bon sens, je vous propose un tour d’horizon des questions concrètes et récurrentes soulevées au sujet de nos choix nutritionnels entre protéines d’origine végétales ou animales…
Protéines végétales et animales au quotidien… que choisir ?
- Faut-il privilégier les protéines animales ou végétales durant nos repas?
- Les végétariens doivent-ils combiner les protéines végétales à chacun de leur repas?
- Manger trop de viande est-il néfaste pour notre santé?
- Les plantes sont-elles un médicament pour le corps?
Remise en question d’une idée sans fondement !
Certains sportifs pensent que l’organisme n’utiliserait qu’une quantité limitée d’acides aminés par repas. Autour de 20-30g de protéines (1).
Le reste ne serait pas absorbable donc éliminé. C’est l’une des raisons qui conduirait à manger plus de 3 fois par jour certains adeptes du culturisme (entre autre). Ceci pour optimiser la rétention des protéines par leur métabolisme, et par là même, leur croissance musculaire… What ??? ! ! ! Manger 6 fois par jour, ne permettrait donc l’absorption que de 120 et 180 g de protéines ??? ! ! ! 😮
Cette limite arbitraire semble aussi s’affranchir de différents facteurs susceptibles d’influencer la réponse métabolique du corps :
- Le moment de l’ingestion (notamment avant ou après la pratique d’une activité physique)
- Composition des protéines
- Associations alimentaires au cours du repas (2,3)
Une étude (4) a comparé 2 repas :
- le 1er contenait 30g de protéines
- le 2nd contenant 90g.
Constat : l’augmentation de la synthèse des protéines musculaires est équivalente entre le 1er et le 2nd.
Bémol : mais la limite et la faiblesse de cette étude réside dans la durée des effets étudiés… seulement 5 h après l’ingestion, sans prendre en compte la réponse de l’organisme sur la totalité d’une journée.
Or, notre métabolisme n’a pas pour habitude de gâcher. Il serait surprenant qu’il n’exploite pas des quantités supérieures à 20-30 g de protéines par repas, au risque de se retrouver carencé en fin de journée.
C’est ce qu’a voulu vérifier une autre étude (5)…
Menée sur des jeunes femmes (autour de 26 ans) elle visait à comparer pendant 14 jours la rétention de protéines sur :
- 1 repas principal (contenant 79% des protéines pour la journée)
- 4 repas séparés. (contenant 79% des protéines pour la journée)
Résultat : pas de différences significatives sur la rétention des protéines entre les deux situations. Idem sur des femmes plus âgées (68 ans en moyenne).
Conclusion : Sans équivoque, l’ingestion des protéines regroupée autour d’1 repas est plus efficace pour améliorer la rétention des protéines.
NB : D’autres études (6,7) menées sur le jeûne intermittent en sont arrivées à des conclusions similaires.
A la lumière des éléments scientifiques disponibles…
Il semble que cette idée d’une limite à la quantité de protéine assimilable par repas soit fausse.
Notre organisme prend le temps qu’il lui faut pour digérer et absorber la quantité de protéine ingérée.
Cela ne signifie pas que nous assimilerions n’importe quelle quantité, mais seulement que cette limite doit plutôt être recherchée sur la durée d’une journée entière (8).
Chiffrer la limite assimilable sur 1 journée est-il possible ?
Visiblement… difficile pour la science de donner un chiffre précis !
Une réponse pertinente devrait prendre en compte de nombreux critères :
- Individuels (âge, poids, taille, etc.)
- Factuels (type de protéine, autres aliments ingérés, etc.).
Seule certitude : la limite se situe bien au-delà des 30 gr par repas, on peut supposer qu’elle est au moins égale à 2 gr / par kg / par jour [2].
Equilibrer ses repas…
Omnivore :
La combinaison d’aliments d’origines animales et végétales facilite l’obtention d’une quantité suffisante de protéines avec tous les acides aminés nécessaires à nos besoins.
Omnivore sportif :
Les entrainements sportifs fréquents (plusieurs fois par semaine) de sport de force ou de grande endurance impliquent une organisation pointue de la préparation des repas. Le cas échéant, le recours aux compléments alimentaires n’est pas exclu si adapter son alimentation est difficile au quotidien.
On peut en revanche s’interroger sur le contenu de son régime, et notamment la répartition entre protéines animales et végétales.
- Selon l’ANSES (9), en France, 65% des protéines consommées sont d’origines animales.
- Les institutions officielles recommandent d’adopter un régime à l’équilibre avec une répartition 50-50 pour les protéines animales et végétales.
Les premières (viande, charcuterie, œufs, poissons, fruits de mer, lait et les produits laitiers) apportent :
- Des protéines
- De graisses (acides gras « saturés » et « trans » dits mauvaises graisses)
- Des micronutriments (notamment le zinc et le fer).
Mais elles sont dépourvues :
- De glucides
- De fibres
Les reproches envers les régimes riches en protéines animales sont :
- D’apporter beaucoup de graisses saturées, trans, et de cholestérol.
- De générer un dépôt d’acide urique dans les articulations (source d’inflammation et de douleurs articulaires)
- D’être acidifiantes, avec pour conséquence le dérèglement de la balance acido-basique de notre organisme, ce qui est nuisible à notre santé.
- De générer (lorsque les produits consommés sont de mauvaises qualités) de grandes quantités de toxines pour notre organisme (antibiotiques et conservateurs).
Végétarien, végétaliens…
Côté protéines, les végétariens auront une solution de facilité avec les œufs et les produits laitiers. Les végétaliens peuvent aussi obtenir un apport protéique plus que suffisant (10), tant que les besoins caloriques sont couverts.
Mais dans une vie active, pas toujours simple au quotidien de prendre le temps de cuisiner et de manger comme on le souhaiterait.
Comment organiser ses repas ? Selon ses goûts et ses contraintes, chacun doit découvrir l’équilibre qui lui convient le mieux.
Combiner ses protéines végétales…un postulat répandu…
Quand on aborde le débat des protéines et des régimes végétarien/végétalien, le postulat le plus fréquent est : les protéines végétales sont « incomplètes »… elles doivent par conséquent être combinées à chaque repas pour satisfaire nos besoins métaboliques nécessaires en acides aminés.
À chaque repas devrait donc être par exemple associés des aliments tel que riz/soja, riz/lentilles, maïs/haricots, blé/pois chiches, oléagineux/légumineuses…
Postulat répandu… mythe ou réalité ?
D’après plusieurs sources (11,12,13,14,) un ouvrage écrit en 1971 par France Moore Lappé (“Diet for a small planet”(15) dénonçait déjà l’impact de la production de viande sur l’environnement et son inefficacité à lutter contre la faim dans le monde. Sa volonté de combattre le mythe de « la viande comme seule source de protéines de qualité », en aurait créée un autre : « La combinaison nécessaire des protéines végétales à chaque repas » pour obtenir tous les acides aminés.
S’apercevant de son erreur, elle s’est rétractée et affirme désormais qu’une personne végétarienne ou végétalienne consommant suffisamment de calories dans une journée est certaine d’obtenir tous les acides aminés essentiels dont elle a besoin. Elle a mis à jour les versions ultérieures de son ouvrage (16).
Cette position est confirmée par l’Association Américaine de Diététique et l’Association des Diététiciens du Canada (17) : « Les recherches indiquent qu’un assortiment d’aliments végétaux mangés au cours d’une journée peut apporter tous les acides aminés essentiels et assurer une absorption et une utilisation appropriées de l’azote chez des adultes en bonne santé ; par conséquent, il n’est nullement besoin de consommer des protéines complémentaires dans un même repas ».
Conclusion : on sait maintenant que le recours à une telle combinaison à chaque repas n’est pas nécessaire tant que tous les acides aminés sont couverts pendant l’ensemble de la journée(18).
Une conclusion cohérente…
Souvenez-vous de 2 autres points étudiés dans cette saga d’articles sur la protéine : notre organisme absorbe les acides aminés après avoir “dé-construit” les protéines ingérées. Cette absorption est réalisée sur un laps de temps pouvant largement dépasser la durée d’un repas.
Faire confiance à son organisme…
Par conséquent, même si, prises individuellement, certaines protéines végétales n’apportent pas toutes les quantités nécessaires d’acides aminés essentiels, notre organisme reste en mesure de couvrir l’ensemble de ses besoins sur la durée d’une journée.
Concrètement… des repas simplifiés !
Que vous soyez végétarien, ou en passe de le devenir… ne soyez pas effrayé(e) par la perspective de cette complexité à équilibrer chaque repas mais concentrez-vous plutôt sur la variété globale de votre régime !
Dans le prochain épisode de cette saga nous essaierons de comprendre si la consommation de protéines animales et/ou végétales est :
-
Nocive ou bénéfique pour notre santé.
-
Néfaste ou positive pour notre environnement.
-
En quoi ces questions sont des perspectives et des enjeux d’avenir.
Pour connaître les réponses à ces questions…. lisez la suite dans l’article 6 de cette « saga des protéines »… 😉
Pour lire les autre épisodes (1,2,3,4,6)…
Cliquez sur les liens ci-dessous :
Les protéines : polémiques, enjeux, débats, controverses et croyances-Article 1
Protéines végétales et animales sont-elles vraiment de qualité différente ? – Article 2
Protéines animales et végétales : leurs valeurs varient-elles et comment l’estimer ? – Article 3
Consommation de protéines : comment définir nos besoins réels ? Article 4
Saga des protéines : régime carné et végétarien, les dangers… Article 6 – fin
-
En attendant… un peu d’action ?! 🙂
Cet article vous plaît ? N’hésitez pas ! Commentez-le et/ou partagez-le ! Merci d’avance ! 🙂
Sources :
- 1 Moore DR, et al. Ingested protein dose response of muscle and albumin protein synthesis after resistance exercise in young men. Am J Clin Nutr. 2009 Jan;89(1):161-8.
- 2 Campbell B, et al. International Society of Sports Nutrition position stand: protein and exercise. J Int Soc Sports Nutr. 2007
- 3 Tipton KD, Wolfe RR. Protein and amino acids for athletes. J Sports Sci. 2004 Jan
- 4 Symons TB, et al. A moderate serving of high-quality protein maximally stimulates skeletal muscle protein synthesis in young and elderly subjects. J Am Diet Assoc. 2009 Sep;109(9):1582-6.
- 5 Arnal MA, et al. Protein feeding pattern does not affect protein retention in young women. J Nutr. 2000 Jul;130(7):1700-4.L’enquête Campbell et le Régime Campbell, Colin Campbell.
- 6 John McDougall – Where do you get your protein? – https://www.drmcdougall.com/misc/2007nl/apr/protein.htm.
- 7 Soeters MR, et al. Intermittent fasting does not affect whole-body glucose, lipid, or protein metabolism. Am J Clin Nutr. 2009 Nov
- 8 Stote KS, et al. A controlled trial of reduced meal frequency without caloric restriction in healthy, normal-weight, middle-aged adults. Am J Clin Nutr. 2007 Apr
- 9 ANSES, Les protéines – https://www.anses.fr/fr/content/les-prot%C3%A9ines
- 10 Alan Aragon – Is there a limit to how much protein the body can use in a single meal? – http://wannabebig.com/diet-and-nutrition/is-there-a-limit-to-how-much-protein-the-body-can-use-in-a-single-meal/.
- 11 org – https://www.youtube.com/watch?v=2m4p8s7xskQ&feature=youtu.be
- 12 Jeff Novick – The Myth Of Complementary Protein – http://www.jeffnovick.com/RD/Articles/Entries/2012/3/28_The_Myth_Of_Complimenting_Proteins.html
- 13 The vegan society – http://www.vegansociety.com/sites/default/files/Protein.pdf
- 14 The vegetarian ressource group – Protein in the Vegan Diet – http://www.vrg.org/nutrition/protein.php.
- 15 McDougall J. – Where Do You Get Your Protein? – https://www.drmcdougall.com/misc/2007nl/apr/protein.htm.
- 16 Lappe FM. Diet for a Small Planet. New York: Ballantine Books, 1971.
- 17 Lappe FM. Diet for a Small Planet, 10th anniversary edition. New York: Ballantine Books, 1982.
- 18 Position of the American Dietetic Association and Dietitians of Canada – Journal of the American Dietetic Association, juin 2003, vol. 103, no 6, 748-765. UnitedHealthcare – http://www.uhc.com/health-and-wellness/nutrition/power-of-plant-protein.